Heidegger et les modernes (Figures) Info
.Ici, la vraie question ne sera plus de savoir si Martin Heidegger fut, ou ne fut pas, le complice philosophique des nazis. Ne serait-il pas plus raisonnable, dès lors, de se demander pourquoi et comment les intellectuels français n'ont pas osé, depuis trente ans, désacraliser une pensée si fermement enracinée dans son refus de la culture démocratique ? Plus encore : Heidegger fut-il, pour nos Modernes anti-modernes, l'ultime caution disponible après l'effondrement des marxismes ? Et ses principales thèses n'ont-elles pas fourni, à l'insu de tous, la matrice dans laquelle des intellectuels en mal de références ont voulu forger leurs slogans et leurs aversions d'époque ? Tel est donc l'objet de ce livre : refaire, à partir d'une oeuvre désormais suspecte, le chemin d'une histoire de l'esprit français et de ses aveuglements. Sur ce chemin, les auteurs rencontreront, bien sûr, la plupart des débats contemporains - du refus de la modernité à la critique soixante-huitarde de nos sociétés, de la haine de la technique à l'anti-humanisme obsessionnel de certains maîtres penseurs. On aura compris que, par-delà le philosophe de Etre et Temps, et par-delà ce qu'il appela lui-même sa "grosse bêtise", ce livre analyse d'abord les singulières naïvetés des intelligentsias qui n'ont jamais pu résister au plaisir de s'égarer.Heidegger et le nazisme : le débat est loin d'être clos. Sans doute avons-nous encore à apprendre des historiens jusqu'où exactement le penseur allemand s'est compromis avec l'idéologie et la politique nationale-socialiste. Mais les enjeux de la querelle déclenchée par cette question, en particulier à la fin des années 1980 avec la publication de l'ouvrage de Victor Farias Heidegger et le nazisme, ne sont pas seulement d'ordre historiques. C'est l'opposition philosophique à Heidegger qui s'exprime à travers l'affrontement régulier entre ceux qui accusent le philosophe et ceux qui défendent son œuvre. D'un côté, ceux qui lisent Heidegger et sont en débat avec sa pensée comme, en son temps, Jean Beaufret ou plus récemment Jacques Derrida. D'un autre côté, ceux qui, comme Luc Ferry et Alain Renaut, récusent l'"heideggerianisme" au nom d'une philosophie humaniste de l'individu et des droits de l'homme (voir La Pensée 68). Ceux-là sont tentés de se servir des errements de l'homme pour condamner l'œuvre.
En survolant les débats successifs que le cas Heidegger a provoqués dans l'intelligentsia française depuis l'après-guerre, l'ouvrage analyse la polémique en des termes simples, sans doute trop simples : l'opposition des Modernes aux anti-Modernes.
Quelques repères dans ce débat récurrent : Philippe Lacoue-Labarthe, La Fiction du politique ; Jean-Pierre Faye, Le Piège : la philosophie heideggerienne et le national-socialisme (1994). Sur la vie du philosophe, on pourra lire Heidegger et son temps de Rüdiger Safranski. --Emilio BalturiIci, la vraie question ne sera plus de savoir si Martin Heidegger fut, ou ne fut pas, le complice philosophique des nazis. Ne serait-il pas plus raisonnable, dès lors, de se demander pourquoi et comment les intellectuels français n'ont pas osé, depuis trente ans, désacraliser une pensée si fermement enracinée dans son refus de la culture démocratique ? Plus encore : Heidegger fut-il, pour nos Modernes anti-modernes, l'ultime caution disponible après l'effondrement des marxismes ? Et ses principales thèses n'ont-elles pas fourni, à l'insu de tous, la matrice dans laquelle des intellectuels en mal de références ont voulu forger leurs slogans et leurs aversions d'époque ? Tel est donc l'objet de ce livre : refaire, à partir d'une oeuvre désormais suspecte, le chemin d'une histoire de l'esprit français et de ses aveuglements. Sur ce chemin, les auteurs rencontreront, bien sûr, la plupart des débats contemporains - du refus de la modernité à la critique soixante-huitarde de nos sociétés, de la haine de la technique à l'anti-humanisme obsessionnel de certains maîtres penseurs. On aura compris que, par-delà le philosophe de Etre et Temps, et par-delà ce qu'il appela lui-même sa "grosse bêtise", ce livre analyse d'abord les singulières naïvetés des intelligentsias qui n'ont jamais pu résister au plaisir de s'égarer..
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